aUne foire et un musée. Lille : Art Up et beaux-Arts. Février 2014 à la Saint-Valentin.
Grand écart de style, d’époque et d’esprit. Je m’y colle, plonge. Immersion totale. Quel bonheur ! Et après coup, me questionne : je ne sais pas comment j’arrive à faire sans. Comment je respire dedans, encore, avec toutes ces pensées non ventilées, stagnantes, quand moi, coincé dans mon cul-de-sac vidé d’Art. Et puis, je me demande par ricochet comment autant de gens font sans.
Bien sûr, de l’Art, il y en peut-être aussi dans un coup de pied sur une baballe, la confection du lard ou le génocide de l’autre parce qu'il est différent etc. Possible. Je n’en doute pas, même si je vois mal. Question de myopie et de flou mal réglé. Je pense tellement fort qu’importe le support et, que finalement, n’importe que la création elle-même, son fond et sa forme, son inventivité et le voyage qu’elle implique, suscite, parfois oblige. Le décalage, un Art qui « bouscule » (Dubuffet) l’esprit. En miette les idées reçues pour nouvel alliage, à sculpter.
L’audace et la dose de liberté qui anime le créateur, humain ou, divin si ça existe. La vie m’épate toujours. La nature m’éclate complètement (j’écris de mon bord de mer fétiche qui m'inspire cette idée). La créativité tout azimut me bluffe. L’artiste est un trésor souvent déprécié. Pas pour me vanter puisque je ne sais pas, ou plus, si j’appartiens à ce genre humain parfois limite extra-terrestre. Mais, moi ou les autres, alors que je me promène dans cette foire Art Up, puis dans ce musée, m’apparaissent comme… des éléments essentiels à la cohérence de nos civilisations, ou à moindre échelle, à l'équilibre mental de chacune chacun. Et à titre perso, sans eux et leur "travail", la vie me gonfle grave.
Sinon Art UP, c’est beaucoup moins chichi que la FIAC ou sans doute moins affairiste que Bâle ou la Frieze de Londres. Et bien sûr, on ne croise pas Boltansky Garouste (j'ai frôlé les 2 artistes et d'autres à des FIAC depuis environ l'an 86 que j'y trotte) et équivalents qui visitent leurs galeristes-chefs, mais plutôt, on fréquente du quidam qui goûtent peu ou prou à l’Art, des petites galeries de province (pas mal de sudistes, et donc pas mal de Di Rosa, Combas et autres de la Figuration libre, aux cimaises) et pas mal de Belgique.
D'ailleurs les Belges, quand même : pour moi et mes goûts, c’est la crème des audacieux et des découvreurs de talents, des gens qui osent, qui font, qui s’amusent dans l’Art (toute catégorie) avec sérieux et talent. Plein de courants d’air dans leurs esprits, vitaux, ce qui évitent toute la poussière ou parfois la crasse, qui entame le marché, un rien snob, et les artistes français, un rien mouton. Mouton tondu.
ART BRUSSEL 2014 : 25 au 27 avril
ART basel 2014 : 19 au 22 juin
Dans les stands et sur les placos, quelques autres vedettes, mortes ou vives avec Hirst chez Mead Carney, Dubuffet chez Jean Creset, Leger, Matisse, Picasso, Tapiès, Venet, Rustin (né 28 et mort juste là, dec2013) Adami, Mesnager, Miro, Morellet, Lapicque, Pignon-Ernest, Lopès-Curval, Pasqua (Philippe) enfin plein, plus ou moins fonds de placard ou parfois papier sorti de la poubelle, mais du monde. Et des prix, pour beaucoup, abordables.
Donc, bonne ambiance. Pas trop de monde. Une foire que je conseille vivement comme "Art Brussel" dans le même genre. Et quelques créations, picturales et autres, qui m'on fait plaisir à découvrir.
(Figuration libre : pour moi, un nœud dans ma mémoire, puisque tandis que je m’enferme dans une école où je m’emprisonne dans un métier qui va m’horripiler à donf ‘ et c'est pas fini, je vois par ma fenêtre en fond de classe près du chauffage - que j’éteins – les affiches géantes de pub piratées dans la nuits par ces artistes encore tout frais et très acrylique avec de la BD plein leurs sangs. Robert Combas aux traits noirs de vitraux - alors que je fréquente à l’époque le peintre Georges Rouault - me frictionne plus que les autres mon appétit de peinture. De cette époque très prolifique, des planches peintes quasiment toutes disparues, pourries, cassées)
Musée des beaux-arts de Lille : à ne pas louper si vous visitez la ville. (J’avais loupé lors de mon précédent passage. Une erreur de timing => je tombe sur le jour de fermeture dudit musée.)
Là, je profite. Après Art up, c'est tout bonus. Cela complète. Cela fait cohérence dans ma tête. Et puis je croise Yann Fabre, la vedette locale, avec ses compositions aux scarabées, quelques têtes de mort habituelles avec quelques rappels religieux façon Fabreuse. Et dans les moderne, un Leroy, peintre que j'affectionne. Le personnage, souvenir d'images de son atelier. Un nordiste avec de la sincérité qui déborde de sa peinture, bien épaisse (et nid à poussière). Pas mouton pour un sous.
Autrement : Un musée bien achalandés. Même si qu’un seul Chardin, de jeunesse, un seul Gréco, un seul Vincent et genre fond de tiroir, etc. Bien, vraiment bien, dans l’ensemble. Les vieilles et jeunes de Goya, ensemble. Pas mal de 18ièm siècle français qu'on voit peu ailleurs. Et bien sûr Rubens et autres nordistes. Un peu de moderne, une galerie. Et tout est bien exposé sur des tons rouges. Là, ce jour, manquait un peu de lumière. Et parfois accrochés trop haut pour vraiment apprécier.
Chez Goya, remarquez la différence de traitement du premier plan avec le fond. Le flou et le net. Un toulouse Lautrec qui se fait rare. Des Vuillards que je découvre.
Rien à voir avec ce qui précède et qui me traverse l'esprit :
J’irai bien voir, à Auvers sur Oise, ce bout de terre dans laquelle les derniers os de Vincent et Théo sont rangés et rongés. Presque chaque matin, je traverse le parc Georges-Brassens qui abrite une communauté de corbeaux. Et pas des petits exemplaires, des maousses. M’arrive d’échanger, ou presque tout comme. Et Vincent n’est jamais très loin.
Aussi, un jour, visiter l’atelier-musée de feu Rebeyrolle à Eymoutiers.
Et puis enfin après Lille, je découvre Dunkerke. Au petit matin quelques costumés traînent. Pas loin de notre terrasse de café, un individu dort sur le trottoir, au bout d'une longue trainée d'urine. Il respire encore.
Dunkerke et donc, je m'approche de Boulogne sur Mer et de mon projet d'écriture : "l'expérience KARAMAZOV". Né à Boulogne Billancourt dans le bois, il se saoule à mort au Dosto dans un hôtel du port à Boulogne sur mer. Etc. Cela mijote doucement dans ma tête. Pas certain que je cuise quelque chose à point, mais, en attendant, je cuisine ma matière...
à+
tHierry